En navigation à voile ce qui fait la différence c’est de savoir prendre la bouffée de vent qui passe. Je vois Zénon comme le timonier d’une très frêle embarcation qui a su comme par instinct prendre les vents porteurs pour amener tous ceux qui l’ont côtoyé au-delà d’eux-mêmes. Il a fait confiance, c’est ce que l’on pourrait écrire à l’entête du chapitre de sa vie.
Un petit coup de vent à l’enfance
Zénon est né le 19 juillet 1927 à Ste-Anne-des-Plaines. Une grosse famille, milieu rural où l’on pratique, depuis toujours semble-t-il, une agriculture de subsistance qui n’avait guère variée depuis les temps de la colonisation. Tout le destinait à s’enraciner dans le sillon des traditions et à passer sa vie « derrière les vaches ». Un petit coup de vent, à l’âge de cinq ans, un prêtre en soutane blanche vient prêcher dans sa paroisse. Ce sera son étoile de mer, celle qui guide les plus audacieux matelots.
Intelligent il passe brillamment ses études primaires. Après sa septième année, il fait sa huitième et sa neuvième année à l'école du village. Son beau-frère Hervé pressent son talent. Pour aider les agriculteurs, il faut des études à ce jeune débordant d’énergie. Le milieu se met en branle, deux ans après les autres, il entreprend son cours classique au petit séminairee de Ste-Thérèse.
Ce retard tourne à son avantage. Il devient comme naturellement le leader des équipes d’étudiants qui dans des activités parascolaires tâtent le pouls du monde. En Philosophie, il préside le Cercle missionnaire où il prend conscience des disparités qui partagent le monde et de l`urgence de venir aux plus défavorisés de la terre.
Ce retard tourne à son avantage. Il devient comme naturellement le leader des équipes d’étudiants qui dans des activités parascolaires tâtent le pouls du monde. En Philosophie, il préside le Cercle missionnaire où il prend conscience des disparités qui partagent le monde et de l`urgence de venir aux plus défavorisés de la terre.
La brise de ses cinq ans lui revient en vent d’une grande impétuosité. Ces vents indiquent son destin. Il sera missionnaire dans le grand monde, au service des plus démunis du globe.
En 1950, il s’inscrit chez les Prêtres des Missions étrangères de Pont-Viau. Il est ordonné prêtre en 1954 et il part l'année suivante pour le Japon. Il apprend le Japonais tout en étant vicaire dans une petite paroisse. Des vues différentes de son supérieur local le ramènent au pays. Il passera l’année 57-58 à donner des conférences sur le Japon au service à la fois de l’Église et de l’État canadiens qui souhaitent accroître leur présence en terre nippone.
En 58, il part pour le Honduras. Cette fois ,il se met à l’espagnol et développe un type d’action pastorale qui fait peur aux autorités ecclésiastiques du lieu. Des manigances en coulisses sous les sourires d’un paternalisme traître le ramènent au pays. Au Nouveau Brunswick, comme vicaire, il est sous la domination d’un curé qui incarne les travers les plus antiévangéliques d’une église qui veut imposer son autorité à tous et partout. Une fois de plus il est le témoin et la victime du contrôle excessif qu’exerce alors l’Église sur la vie des gens. Il y sera un an à contrevents de l’Église établie.
En « punition » on le ramène au Québec à titre d’aumônier de la nouvelle école secondaire de Ste-Agathe et de curé de la paroisse Saint Agricole. C’est un milieu nouveau. Aucune tradition ne guide l’action pastorale auprès des jeunes du secondaire si ce n’est les pratiques quotidiennes de la messe, de la récitation du chapelet, de la confession mensuelle de tous les étudiants en vue de la célébration du premier vendredi du mois, des grandes fêtes ou des quarante-heures. Le vent du concile Vatican II inspire une nouvelle façon de vivre sa foi chrétienne. Les porte-voix d’une toute nouvelle évangélisation sont à créer de toute pièce.
Si mes souvenirs sont exacts Zénon m’avait raconté que c’est à la paroisse de St-Agricole qu’il a introduit la musique (populaire) dans sa messe du dimanche. Après deux semaines d’essai, l’église s’est remplie de curieux et de journalistes qui ont qualifié cette messe de "Messe à gogo". La nouvelle a fait le tour du Québec, de l'Europe et du monde. Pourtant les jeunes chantaient des chants grégoriens et des psaumes bien vivants, tirés du manuel de prières des Cursillistes, comme "Alleluia! Venez chanter le Seigneur" ». What a GOGO !!!
Et suite à ce branlebas, c’est le Cardinal Léger qui avait invité Zénon à venir à Montréal. Bernard
Et suite à ce branlebas, c’est le Cardinal Léger qui avait invité Zénon à venir à Montréal. Bernard
En même temps, le souffle de la Révolution tranquille ouvre des polyvalentes partout, partout il faut des aumôniers.C’est ainsi que Zénon se retrouve en 1965 aumônier à l’école secondaire Pie IX puis à la nouvelle école Henri-Bourassa l’année suivante. Il y restera jusqu’en 1978.
Interpeller et faire prendre conscience
Zénon s’inscrit à plein dans le vent du renouveau qui souffle au Québec et principalement dans le domaine de l’éducation.
D’emblée, sans grands discours, il comprend que l’évangélisation en milieu scolaire doit s’articuler sur d’autres axes que ceux de la pratique sacramentelle et de la morale. Il ne s’agit pas principalement d’amener les jeunes à Dieu ou à la conformité à un code moral prédéfini. Il faut amener Dieu aux jeunes. Les interpeler, leur faire prendre conscience d’eux-mêmes, leur donner confiance en eux-mêmes, à la vie, aux autres et à l’avenir.
Et cela ne se fait pas par des discours (sermons). C’est un apprentissage qui se réalise dans le concret de la vie, de leur vie à eux, non celle des normes, ni celle des cadres. Pour arriver à ces fins Zénon développera deux outils principaux : les camps de vacances ou de fin de semaine et les comités de pastorale.
De ses faibles économies, il se fait bâtir à Morin Heights un chalet qui peut loger une soixantaine de personnes. Plusieurs groupes mixtes d’élèves accompagnés de quelques parents et professeurs s’y succéderont. À bout de sous et après quelques années d’expériences concluantes, il obtient appui du Club Richelieu par l’intermédiaire des parents qui siègent au conseil d’administration du club. qui le parrainera jusqu’à la fin de son séjour à Henri-Bourassa. On ne saurait compter le nombre de camps qu’il fit ainsi pendant qu’il était aumônier à Henri-Bourassa de 1966 à 1978.
Zénon n’étant pas très doué pour l’administration ce comité aura permis de réduire la dette du camp de moitié en deux ou trois ans. Je suis arrivé à cette époque 1972 à 1974. Nous avons malheureusement été obligés de remettre l’édifice à l’hypotéqueur.
Je me souviens qu’une fois, les actifs liquidés, Zénon s’est retrouvé avec une dette de $14,000 il me semble puisqu’il avait endossé personnellement un prêt auprès d’une communauté. Je me rappellerai toujours de cette soirée où, revenant de la rencontre qui liquidait les actifs et ou Zénon héritait de cette dette, j’étais tout surpris de voir Zénon serein et enjoué. Je lui ai même demandé s’il était venu au monde comme ça ? Il m’a répondu qu’il avait une grande confiance dans la providence et que tout allait s’arranger. Ce qui fut fait !!! Bernard
Comités de pastorale
Conscient que les jeunes doivent vivre des engagements de foi plutôt que d’être enseignés ou sermonnés sur la foi, il organise au sein de l’école cinq comités de cinq étudiants qu'on appellera "Cité-Jeunesse" et qui prendront la charge de la pastorale : JEC, Camps de ressourcement, Liturgie, Œuvres caritatives et Bénévolat.
M. l’Abbé St-Louis, en charge de la pastorale pour la CECM adoptera cette organisation pour toutes les écoles secondaires de l’Ile de Montréal.
En 78, Zénon est épuisé. Il doit refaire sa santé. Des remaniements au sein du diocèse de St-Jérôme auquel il appartient toujours l’amènent curé à St-Benoit de 78 à 83 puis à la paroisse Sacré-Cœur de Ste-Thérèse. On y trouve toujours le même Zénon toujours et toujours à l’écoute des gens. Son empathie naturelle est conquérante et fait de lui un phare d’Évangile qui éclaire, un levain dans la pâte qui anime et inspire tous les milieux.
Je sais que durant son passage à St-Benoît et même à Ste-Thérèse il était très impliqué dans le mouvement « Mariage Encounter ». Bernard
Parrainage
Je sais que durant son passage à St-Benoît et même à Ste-Thérèse il était très impliqué dans le mouvement « Mariage Encounter ». Bernard
Parrainage
À St-Benoît, avec un comité d'accueil aux réfugiés de la mer, Zénon parrainera trois Laotiens puis le reste de la famille neuf mois plus tard, en tout 12 personnes. Puis, en 1983 , le même comité dont Andrée Turgeon spécialement, va parrainer deux autres réfugiés de la mer, Nguyeb Duy et sa mère. Duy va spécialement profiter de l'accueil d'Andrée (marraine) et de Zénon (parrain).
C'est ainsi que Zénon devint un père-prêtre. Cré Zénon!"
Retraite
En 2002, l'évêque invite Zénon à prendre sa retraite. À la retraite, Zénon, sans aucune charge officielle, assure les célébrations eucharistiques dans 6 foyers pour personnes âgées et à l’hôpital de St-Eustache. De plus, il répond aux demandes de service de sa paroisse natale, Ste-Anne-des-Plaines Il est aussi souvent requis par plusieurs salons funéraires pour prononcer l’homélie lors des cérémonies funéraires qui se font de plus en plus au salon même.
À l'Arche des Jeunes
Zénon est venu souvent à l’Arche soit le dimanche où il animait les célébrations eucharistiques que nous tenions en petits groupes pour quelques archers et leurs parents. Quand il le pouvait, il participait aussi aux partages évangéliques que nous, les frères de l’Arche, tenions tous les lundis soir.
Zénon a toujours encouragé le mouvement de l’Arche des Jeunes. Sa présence et ses paroles chaleureuses étaient grandement appréciées des jeunes. Il a fait confiance à Bernard qui lui doit sa carrière de directeur de camp. Zénon répondu à la plupart des rencontres quinquennales pour archers que Bernard a organisées depuis 1977. Plusieurs jeunes de l’Arche m’ont dit avoir été mariés par Zénon.
À la proue des changements
L’image qui pour moi définirait le mieux Zénon, est celle d’un capitaine au gouvernail de son navire. Au cœur de la tempête sa sérénité inspire la confiance. Au sein des vagues et marées, successives et contradictoires il sait garder le cap à son esquif et trouver la juste manœuvre qui profitera à qui lui fait confiance.
Il n’est pas l’homme d’un livre, d’un dogme, d’une théorie ou d’une autorité. Il est l’amant d’une personne, Jésus qu’il a rencontré et dont il rayonne l’amour et l’affection dans son entourage quel qu’il soit.
Pour lui, aucun changement n’est à craindre devant le bien qu’on en peut tirer. Aucune norme n’est contraignante devant l’éclosion de la vie, la marche de sa libération et l’expression de son amour.
Nolite timere! Ne crains rien! Tel pourrait être l’essentiel de son interpellation. Jésus a vaincu le monde, il le sait, il le croit, il en vit et il le répète inlassablement à qui veut bien l’entendre.
Cré Zénon! Il ne s’en fait plus de pareils.
Florian
(Les textes en italique et en bleu sont de Bernard)
(Zénon est présentement hospitalisé à St-Eustache où il subit des examens pour arthrite aiguë,)
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